Université d'hiver 2025 Unser Land

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Quel impact de la loi Zéro Artificialisation Nette – ZAN ?

Pourquoi lutter contre l’artificialisation des sols ? La ZAN est-elle une bonne loi pour traiter ce sujet ? Compte rendu d’une table ronde sur le sujet à l’Université d’hiver d’Unser Land de janvier 2025.

Y intervenaient sous la médiation de Jean-Georges Trouillet, président d’Unser Land, Frédéric Gruet, haut fonctionnaire et responsable de la commission « Biodiversité et nature » des Ecologistes – EELV, Jean-Marc Biry, président de l’ASMA (Association de Sauvegarde de la Maison Alsacienne), et Nicolas Undreiner, adjoint au maire de Niederschaeffolsheim.

Débat sur la loi ZAN à l'université d'hiver 2025 d'Unser Land

Pourquoi une « loi ZAN » ?

Elle est partie d’un constat : en France, sur la période 2009-1er janvier 2023, le rythme moyen de consommation d’espaces a été de presque 25 000 hectares/ an, soit 250 km2 chaque année (source : rapport du Cerema). Et comme toujours, ce sont les meilleurs (sols) qui partent les premiers… Actuellement, 66% de la surface artificialisée est consacrée à l’habitat, 24 % à l’activité économique, et 5% aux routes.

Cela ne peut évidemment pas durer indéfiniment. Les effets négatifs de l’artificialisation des sols sont nombreux : ruissellement plus rapide des pluies, réchauffement plus fort, élimination de la biodiversité.

Frédéric Gruet pointe un autre effet, moins connu, qui touche déjà notre santé. Une étude de 2008 a montré l’augmentation de nouvelles maladies infectieuses et leur lien avec ce sujet. La période 1940-1950 a connu 20 nouvelles maladies infectieuses, dont 60% étaient des zoonoses, cad des maladies transmises par les animaux ; pour la période 1990-2000, on constate 75 nouvelles maladies, dont 75% de zoonoses. Cause de ces zoonoses : les animaux d’élevage et les liminaires (souris, etc.), mais surtout les animaux en voie d’extinction dont les hommes accaparent le milieu naturel et qu’ils  consomment (rappelons-nous le Covid et le pangolin suspecté d’en être à l’origine – ndlr). La course à l’artificialisation des sols devient la principale cause de l’augmentation ces nouvelles maladies.

Ce que dit la « loi ZAN »

Il s’agit en fait du chapitre III de la loi Climat et résilience du 22 août 2021 qui vise un objectif de zéro artificialisation nette (ZAN) à l’horizon de 2050. Cette loi a également établi (article 191) un premier objectif intermédiaire de réduction par deux de la consommation d’espaces naturels, agricoles et forestiers pour la décennie 2021-2030 par rapport à la décennie 2011-2020.

Concrètement, pour respecter ces objectifs, on impose progressivement plus de restrictions à l’utilisation d’espaces naturels pour le bâti. Et à partir de 2050, toute surface artificialisée pour la première fois doit être compensée par une renaturation d’une surface déjà artificialisée.

La mise en œuvre de ces contraintes ZAN doit être incluse dans les « schémas de cohérence territoriale » (SCoT), documents de planification stratégique à long terme (environ 20 ans) élaborés par les régions et avec lesquels les Plans Locaux d’Urbanisme (PLU) municipaux doivent être compatibles.

Le sujet est particulièrement sensible en Alsace avec une forte densité de population sur un petit territoire (8 000 km2). De nombreux villages, autrefois séparés, par exemple au Kochersberg, se touchent maintenant à travers leurs nouveaux lotissements ou zones d’activité. D’où l’importance pour l’Alsace de récupérer cette compétence régionale si elle veut maîtriser elle-même son avenir foncier.

Une loi vague… et recentralisatrice

Les entreprises et collectivités craignent déjà les effets de cette loi ZAN d’ici 2030, date de premier bilan. Jean-Marc Biry remarque que cette loi est effectivement trop rigide pour être applicable, il faut garder de la flexibilité sur le long terme.

Et cette loi ZAN n’est pas dotée de moyens budgétaires, c’est donc les collectivités territoriales et avec elles les acteurs économiques qui devront « faire avec ». L’horizon en est lointain : 2030-2050, donc difficile à planifier en particulier pour les collectivités locales qui n’ont pas de visibilité à long terme, l’Etat ne garantissant pas (euphémisme) les recettes.

Frédéric Gruet pointe un autre effet pervers, qui aboutit à une recentralisation de fait : l’Etat mène de grands travaux (autoroutes et autres infrastructures)… qui sont exclus des contraintes de la loi ZAN. Les collectivités territoriales se retrouvent seules à porter la contrainte.

Nicolas Undreiner note aussi que les plus vertueux, ceux qui ont le moins artificialisé les sols, sont aussi les plus pénalisés par un gel des surfaces bâties : ils ont moins de foncier disponible pour travailler.

Quelques pistes ont été mentionnées pour corriger cette loi et en faire un atout pour les collectivités locales. Donner un bonus de dotation aux collectivités vertueuses qui ont mieux préservé l’environnement. Ou encore baisser la TVA pour construire sur un sol déjà artificialisé : cela permettrait de faire face aux nombreux surcoûts, notamment de dépollution des sols.

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