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Les conseillers régionaux du Grand Est augmentent leurs indemnités de 25%

Pas de débat sur le fond, attitude méprisante pour les opposants: la manière dont le conseil régional du Grand Est a décidé pose problème pour la démocratie.

Pour sa première vraie séance, ce vendredi 23 juillet 2021, le conseil régional du Grand Est a été productif. D’abord les discours d’introduction où chaque groupe a rappelé ses positions. En l’absence de Brigitte Klinkert, le lorrain Christophe Choserot, partisan avoué du Grand Est, a réitéré le souhait du groupe « La force de nos territoires » de voir la région gérée de façon déconcentrée. Jean Rottner lui a vite rétorqué que c’est exactement ce que faisait Grand Est avec les « maisons de territoire ».

Le logo de la région Grand Est avec sa signature aussi prétentieuse qu’infondée

Laurent Jacobelli (RN) a été le seul à marquer son opposition au Grand Est qu’il a (re)qualifié de « monstre administratif » en dénonçant les propos hautains de Jean Rottner après sa réélection (« Je ne saurais tolérer plus longtemps les prises de position de ceux qui continuent à clamer l’aberration administrative, l’inefficacité du mastodonte, la déréliction identitaire »). Laurent Jacobelli a dénoncé dans la foulée la « sanctuarisation » d’un budget de com pour redorer l’image de la région et annoncé son opposition à l’augmentation de 25% des indemnités des conseillers régionaux du Grand Est. Son intervention, sur un ton certes populiste, a eu le don d’agacer la majorité régionale en soulevant les bonnes questions.

Des indemnités liées à la taille de la collectivité et cumulables avec les mandats

Car c’est là la principale décision des conseillers régionaux Grand Est lors de cette séance : voter une augmentation de 25% des indemnités qu’ils touchent, effaçant ainsi la baisse de 20% de ces indemnités que Philippe Richert avait fait passer en son temps. Ils vont ainsi toucher 2 700€ bruts mensuels chacun, avec 10% en plus pour les membres des commissions permanentes et 40% de plus pour les vice-présidents. Le président perçoit quant à lui 5 600€ brut par mois. Pas exagéré pour un poste de responsabilité à plein temps, dira-t-on.

Sauf que conseiller régional n’est pas un job à plein temps et que ces élus exercent presque tous d’autres responsabilités elles-aussi rémunérées : maires, députés, sénateurs, etc. Les élu(e)s de la liste Jean Rottner en Alsace en sont un bon exemple : ils/elles cumulent presque tous/toutes un autre mandat électoral avec celui de conseiller régional avec des indemnités là aussi: de 2000€ à 5 600€ pour un maire selon la taille de la ville, et la moitié pour un adjoint. Un cumul finalement juteux, ce qui explique la ruée des maires et adjoints alsaciens pour figurer en bonne place sur la liste de Jean Rottner et les plaintes de ceux qui n’ont pas été élus « à cause de la liste de Brigitte Klinkert ».

Cerise sur le gâteau: toutes ces indemnités varient avec la taille de la collectivité. Si on était resté sur une région Alsace (entre un et deux millions d’habitants), l’indemnité du conseiller régional serait de quelque 1 900€ alors qu’avec la méga-région du Grand Est (plus de trois millions d’habitants) elle est d’un peu plus de 2 700€. 800€ par mois de différence: on ne s’étonnera plus que les conseillers régionaux soient si attachés à leur chère région Grand Est…

Chère, cette région l’est surtout au sens propre du terme: indemnités, frais de déplacement et communication, locaux, tout est plus grand comme le détaille Jean-Philippe Atzenhoffer dans son livre Le Grand Est, une aberration économique… celui-là même que décrie Jean Rottner avec ses récents propos (cf ci-dessus).

Le conseil régional vote mais ne débat pas

On s’offusquera donc des non-réponses aussi hautaines que superficielles de la garde rapprochée de Jean Rottner à la charge de Laurent Jacobelli. Jean Rottner n’a pas daigné répondre. Arnaud Robinet, maire de Reims, a martelé que « tout travail mérite salaire » sur le même ton qu’un agent de police déclarant « circulez, y’a rien à voir ». Et la vice-présidente Valérie Debord, toujours égale à elle-même, a tancé avec aplomb Laurent Jacobelli : « Calmez-vous et nous pourrons écouter un peu (sic) ce que vous dites ».

Sur le fond du problème, cad quel temps un élu doit-il consacrer à sa fonction et de combien faut-il le défrayer : pas un mot ! Voyez par vous-mêmes, le replay de la session est sur le site du conseil régional du Grand Est (avant-dernier sujet, durée 14’). Finalement, seul le groupe RN a voté contre cette résolution.

conseil régional Grand Est Valerie Debord Arnaud Robinet
Valérie Debord et Arnaud Robinet à la tribune du conseil régional du Grand Est

Outre la pauvreté du débat, le timing de cette augmentation est hasardeux. En pleine crise sanitaire et sociale, en profitant d’une session de fin juillet, cette augmentation ne va pas redorer auprès des citoyens le blason de ces élu(e)s… lesquel(le)s ont pourtant pleuré des larmes de crocodile en début de session sur le récent taux d’abstention. C’était hélas prévisible et prévu, l’exemplarité est décidément une notion inconnue de ce conseil régional du Grand Est.

Benoît Kuhn, 26 juillet 2021

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